"Aujourd'hui, je n'en suis que plus passionée" : 7 questions sur la co-création d'IA avec Cleverdoc
Entretien avec le Dr Daphné MULLIEZ, Interne en radiologie des hôpitaux de Reims
Créer une IA au cours de sa thèse en radiologie, c’est le défi que le Dr Mulliez à réalisé avec Cleverdoc. Au cours de sa thèse en radiologie sur l’imagerie de la femme, elle a co-construit un algorithme de mesures de l’utérus avec Cleverdoc et le Centre Hospitalier de Valenciennes. Nous lui avons posé 7 questions afin de vous faire partager son retour d’expériences.
Bonjour Dr Mulliez, pouvez-vous nous présenter rapidement votre parcours ?
Bonjour ! J’ai fait mes études à la Faculté de Médecine de Lille pendant 6 ans. Suite au concours de l’internat, j’ai pu obtenir un poste au sein du CHU de Reims en Radiologie. Au cours de ces 5 années, j’ai pu découvrir les multiples surspécialités qui existent dans la radiologie, et je me suis prise d’un intérêt fort pour l’imagerie de la femme, sujet sur lequel j’ai réalisé ma thèse dernièrement. Ma thèse visait à créer un algorithme basé sur l’intelligence artificielle (IA) appliqué à l’imagerie de la femme, en particulier la mesure automatique de l’utérus en IRM avec l’équipe du Centre Hospitalier (CH) de Valenciennes.

Pouvez-vous nous expliquer comment ce projet s’est déroulé ?
Ce projet est à l’initiative de l’équipe du CH Valenciennes, qui avait déjà mené un travail d’IA avec une autre startup du secteur, et qui a décidé de collaborer avec Cleverdoc. Dans un premier temps, il a fallu sélectionner, importer, et annoter les images IRM pour l’entraînement du modèle. Cette étape a été longue et fastidieuse, plus de 1800 séquences à annoter !
Dans un second temps, Cleverdoc a entraîné l’IA sur la base de ces données. Nous avons eu des échanges réguliers pour nous tenir informés de l’avancée, mais aussi discuter des problématiques qui ont pu se poser et définir une approche pour franchir ces obstacles. De plus, dans le cadre spécifique de ma thèse, nous avions besoin d’indicateurs particuliers, et Cleverdoc a dû mettre en place des outils pour les exploiter. Ces discussions, et l’ensemble du travail effectué ont été très enrichissants, pour moi dans un premier temps, mais aussi pour les équipes du CH Valenciennes.
Quel a été votre ressenti au cours de ce projet ?
Tout s’est très bien passé. À part ce début fastidieux que j’évoquais tout à l’heure. J’ai voulu réaliser seule cette 1re étape dans le cadre de ma thèse, mais il aurait largement été possible de répartir ce travail entre plusieurs radiologues pour qu’il soit moins lourd. Le sujet de l’exercice était intéressant et j’ai beaucoup appris en le réalisant. Aujourd’hui, je n’en suis que plus passionnée. Je voulais d’ailleurs adresser mes remerciements à toute l’équipe de Cleverdoc qui a été très réactive, pertinente dans ses remarques et efficace. On a pu avoir de vrais échanges constructifs à de nombreuses reprises et cela a été apprécié par toute l’équipe du CH Valenciennes.
Avant de vous lancer dans cette aventure, connaissiez-vous l’IA ?
Pas du tout ! Enfin… Comme tous les radiologues, j’en entends constamment parler en congrès, et j’en ai utilisé au cours de mon internat ; mais rien concernant son fonctionnement plus intime ou les méthodes pour les créer. J’ai d’ailleurs commencé la rédaction de ma thèse par une longue introduction sur le sujet, qui m’a permis de me former sur ce thème complexe.
Développer une IA au cours de sa thèse en radiologie, est-ce courant ?
Oui, assez courant actuellement. Tout le monde parle de l’IA en congrès, au sein des services de radiologie… Cependant, la plupart s’orientent sur des algorithmes d’aide au diagnostic. Ce sont des algorithmes plus lourds à développer et avec des implications et des réglementations beaucoup plus sensibles. Ma thèse se différencie fortement par son sujet d’application : la création d’un algorithme d’aide au radiologue et non d’aide au diagnostic. Nous avons créé un outil plus simple qui vise à remplacer le radiologue sur des tâches répétitives, routinières et sans valeur ajoutée de l’humain telles que la prise de mesure.
Votre projet de thèse est terminé, quelle sera la suite pour vous désormais ?
Ma thèse est terminée, mais ce n’est pas le cas de mon projet ! Nous souhaitons encore l’améliorer et étendre son spectre d’applications. Certaines mesures doivent être affinées, et nous souhaiterions les intégrer automatiquement dans les comptes-rendus des radiologues. La présentation de mon travail à mon jury de thèse à permis d’ouvrir un débat et des discussions très intéressantes et stimulantes pour la suite. Un des membres du jury spécialisé en gynécologie avait, par exemple, de nombreuses idées de projets portant sur d’autres mesures à automatiser ou d’autres indicateurs à calculer. Nous continuons à en discuter avec Cleverdoc pour poursuivre le développement de cet outil.
Avec le recul aujourd’hui, recommanderiez-vous ce type de sujets aux futurs jeunes internes en radiologie ?
Absolument. C’est un sujet très intéressant et d’avenir. On en entend beaucoup parler pour l’aide au diagnostic, mais les outils tels que celui que ma thèse a contribué à créer sont encore très rares, malgré l’aide qu’ils pourraient nous apporter au quotidien. Il existe de tels outils pour certains organes tels que la prostate ou les reins, mais beaucoup reste à faire dans chacune des surspécialités de ce vaste monde qu’est la Radiologie. Les partenariats de ce type entre les médecins, les centres hospitaliers et les industriels du secteur sont importants et nous permettront de mettre au point les outils dont nous avons réellement besoin.